L’Age d’or des Pères de l’Eglise (IIIe Ve siècles)

Introduction : la situation de l’Eglise au IIIe siècle… et suivants

Une définition des "Pères de l’Eglise" : « Les Pères de l'Eglise sont des auteurs chrétiens, le plus souvent des évêques, en tout cas toujours des hommes chargés de responsabilités pastorales, qui dans les premiers siècles de l'Eglise, par leur prédication et par leurs écrits, ont influencé les développements de la doctrine chrétienne et contribué à la formation des chrétiens de leur époque et des siècles à venir. Généralement on parle des "Pères de l'Eglise" pour les écrivains des cinq ou six premiers siècles ». (introduction du site "peresdeglise.free.fr").

Lorsque commence le IIIe siècle (200 et années suivantes), l’Eglise a déjà eu des "Pères" :

Ils se sont préoccupés tout particulièrement des hérésies (nombreuses). C'est par là que s'expliquent en partie les grands Conciles : Nicée (325), Constantinople (381), Ephèse (431)... On sait le rôle de certains "Pères" pour lutter contre les hérésies : Irénée (V. 140 – 208), St Hippolyte de Rome (v. 170-v 235)... Il s’agit très précisément, alors que l’Eglise s’étend, de préciser le contenu de la foi, les limites à ne pas franchir pour rester dans l’orthodoxie, la conformité à l’évangile…

On classe aussi parfois les Pères en "Pères grecs" (Origène, Clément d’Alexandrie, Jean Chrysostome…) / "Pères latins" (Tertullien, Lactance, Augustin…). Notez bien que la langue de l’Eglise des tout premiers siècles est d’abord le grec : Augustin (Afrique du Nord) va contribuer à l’extension de l’usage du latin comme langue de l’Eglise en Occident.

A partir du IIIe siècle, et les siècles suivants, on aura une "floraison" de Pères, qui nous ont laissé des écrits remarquables (à découvrir/redécouvrir progressivement). Tellement, et de façon si prodigieuse que l’on appelle cette époque "l’âge d’or des Pères de l’Eglise" (cf. un cours sur Domuni par A.G. Hamman : Enseignement Inithéo : Initiation aux Pères de l'Eglise. 3. L'âge d'or des Pères, cours en ligne payant). Généralement on date la "fin de l’Age d’or" plus ou moins avec la mort d’Augustin vers 430-450. Pendant cette période (pour citer quelques noms majeurs) on aura vu en particulier :

L’idée, toutefois, qu’il n’y aurait plus de "Pères" avec la fin de l’âge d’or, est abusive (cf. tout au long de l’histoire ensuite : St Bernard, St Anselme, St Jean de la Croix, etc. : je dirais même qu’il y a encore des Pères aujourd’hui : Teilhard de Chardin, mais aussi Karl Rahner, Hans Urs von Balthasar… et tout simplement Joseph Ratzinger ou Raniero Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale).(1).

Pour réfléchir au rapport des "Pères" avec ceux qu’on appelle les "Docteurs de l'Eglise", on soulignera que les Docteurs, quant à eux sont en nombre limité (il faut avoir été proclamé docteur); ils sont plutôt ceux dont l’œuvre globale et la vie (ils sont tous saints – ce qui n’est pas le cas des Pères) ont été considérées comme essentielles pour la foi de l’Eglise (ce qui ne veut pas dire que leurs écrits soient toujours abondants) ; c’est pourquoi, à part les tout premiers "Pères-docteurs" (4 Grecs, 4 Latins), l’Eglise proclame Docteurs certains hommes et certaines femmes en raison de la qualité exceptionnelle de leur réflexion théologique, de leur ardeur et du rôle qu'ils ont joué dans le développement de la foi. Il y a, pour l’instant, trente-trois docteurs de l’Eglise.

Cette époque du IIIe-Ve siècles, celle où l’Empire devient chrétien, après le temps des grosses persécutions, est celle où l’Eglise doit mieux préciser le contenu de sa foi face aux grandes hérésies – ce qui explique, suscite bien des œuvres précisément que nous étudierons au long de cette année. C’est aussi l’époque de la naissance et de l’épanouissement du monachisme et la grande époque de la découverte de la lecture et de l’interprétation de la Bible : rappelons que c’est le moment où Jérôme établit le texte de la Vulgate (cf. controverse avec Augustin à ce propos !), mais aussi où se développe extraordinairement la "lecture symbolique", précisément à travers ces Pères (cf. en particulier l’Ecole d’Alexandrie), au-delà de la simple lecture littérale.

Il est donc important de bien situer cette époque, et de connaître les principales données historiques qui la caractérisent et que je vais d’abord essayer (c’est une gageure) de résumer ici. [On pourra se reporter à cette chronologie au fil du cours, quand des rappels sur les dates et époques se révèleront nécessaires].

Chronologie rapide de cette époque

201-203Persécution de Septime Sévère. Martyre du père d’Origène à Alexandrie ; martyre de Félicité et Perpétue à Carthage ; Exil de Clément d’Alexandrie en Cappadoce
204Hippolyte : Commentaire sur Daniel, Origène prend la direction de l’école catéchétique d’Alexandrie
207Tertullien : Traité contre Marcion
211Mort de Septime Sévère ; règne de l’Empereur Caracalla
215Tertullien : Traité contre Praexes ; Mort de Clément d’Alexandrie
217Assassinat de Caracalla : NB : c’est une époque troublée : les Empereurs meurent souvent assassinés.
v. 225Hippolyte : Elenchos (réfutation) contre les hérétiques ; Pontien, évêque de Rome, Origène : Traité Sur les Principes.
235Assassinat d’Alexandre Sévère ; les empereurs se succèdent (15 empereurs en 50 ans), sont assassinés… C’est cette année que sont martyrisés Pontien et Hippolyte.
248Cyprien devient évêque de Carthage. Origène écrit son Contre Celse.
250Persécution de l’empereur Dèce qui prescrit à tous les citoyens de participer à un sacrifice en l’honneur des dieux : chacun peut recevoir alors un certificat attestant qu’il a rempli son devoir religieux. La persécution est particulièrement violente en Orient : Origène est torturé cruellement.
251Corneille est évêque de Rome. Une question importante : quelle conduite tenir à l’égard des "lapsii" ? Cyprien écrit son traité De unitate Ecclesiae (sur l’unité de l’Eglise) et le traité De lapsis.
254Mort d’Origène
258Persécution de l’empereur Valérien. A Rome, l’évêque Sixte II et le diacre Laurent sont martyrisés ; c’est aussi le cas à Carthage de Cyprien.
270Mort de Claude ; Aurélien devient empereur, il tente d’imposer le code unique du Soleil. Porphyre écrit son Traité contre les chrétiens.
274Naissance de Constantin, fils de Constance Chlore et de sa concubine Hélène.
284Dioclétien est proclamé empereur. Pendant toute cette époque la pression des "barbares" augmente sur l’Empire.
293Organisation du système de la tétrarchie : deux Augustes et deux Césars assument collégialement le pouvoir central et se partagent la défense des frontières.
303Publication de quatre édits successifs de persécution contre les chrétiens.
311-312Edit de tolérance de l’Auguste Galère ; en 312, c’est la victoire de Constantin au pont Milvius.
313L’édit de tolérance à l’égard des chrétiens ou "édit de Milan" est signé. Première fondation cénobitique avec Pacôme en Haute-Egypte.
314Au Synode d’Arles : le donatisme(2) est condamné.
319Constantin a donné depuis cinq ans à l’évêque de Rome le domaine du Latran. Commencent maintenant les travaux de la basilique St-Pierre du Vatican.
323Au Synode d’Alexandrie, Arius(3) est condamné.
324Constantin choisit Byzance pour édifier sa nouvelle capitale : Constantinople. Publication de l’Histoire ecclésiastique d’Eusèbe de Césarée.
325Concile œcuménique de Nicée : condamnation d’Arius et de sa doctrine ; élaboration d’un symbole de la foi. Mais pendant tout le siècle qui vient, vont se poursuivre à échéance régulière des synodes ariens.
328Athanase est évêque d’Alexandrie.
330Macaire fonde une communauté d’anachorètes en Egypte.
336Mort d’Arius… mais l’arianisme n’est pas mort !
337Mort de Constantin : proclamation de ses fils, élimination de leurs cousins.
341Wulfila, évêque arien des Goths contribue à la diffusion de l’arianisme chez les Barbares.
347Hilaire devient évêque de Poitiers.
354Naissance d’Augustin à Thagaste en Afrique le 13 novembre.
356Mort de saint Antoine. Hilaire est exilé en Asie Mineure par Constance : il compose le De Trinitate.
357Publication du Contre les ariens d’Athanase.
v. 364Basile de Césarée, un des Cappadociens publie le Traité contre Eunomios, une réfutation des thèses ariennes.
367Epiphane est évêque de Salamine, Cyrille de Jérusalem (nicéen) est exilé par Valens. Mort d’Hilaire de Poitiers.
370Martin devient évêque de Tours.
371Grégoire (frère de Basile), évêque de Nysse, écrit son Traité sur la virginité.
372Grégoire, ami de Basile, devient évêque de Nazianze. C’est l’année du baptême de Jean Chrysostome (qui a 27 ans).
373Ambroise devient évêque de Milan (bien qu’il soit encore catéchumène). Il est alors baptisé, puis sacré évêque. Commence le premier séjour de Jérôme en Orient
376Augustin, qui a 22 ans, commence à enseigner la rhétorique à Carthage.
378Jérôme est ordonné prêtre à Antioche.
379Mort de Basile. Grégoire de Nysse publie son Traité sur la Création.
380Grégoire de Nazianze, évêque de Constantinople, prononce ses Discours théologiques, qui défendent la doctrine trinitaire orthodoxe.
381Grégoire quitte le siège de Constantinople. Le Concile de Constantinople (2e concile œcuménique) impose définitivement l’orthodoxie nicéenne. Il règle en outre l’organisation ecclésiastique en la liant à la géographie administrative et confirme l’indépendance des diocèses.
383Augustin s’installe à Rome ; l’année d’après il va obtenir la chaire de rhétorique de Milan.
385Jérôme quitte Rome pour l’Orient
386Grégoire de Nysse publie sa Grande catéchèse.
387Augustin, qui a 33 ans est baptisé à Milan par Ambroise, en même temps que son fils Adéodat. Mort de Monique, la mère d'Augustin.
390Mort de Grégoire de Nazianze. Grégoire de Nysse quant à lui publie sa Vie de Moïse, ses Homélies sur le Cantique des cantiques.
395A la mort de Théodose, il y a partage définitif de l’Empire romain entre ses deux fils : Honorius devient empereur d’Occident, Arcadius empereur d’Orient.
396Augustin est évêque d’Hippone en Numidie. Mort de Martin de Tours.
397Mort d’Ambroise de Milan.
398Jean Chrysostome est consacré évêque de Constantinople.
399Augustin débute son traité De Trinitate. C’est aussi l’époque où il écrit Les Confessions (entre 397 et 401).
401Jean Chrysostome fait déposer six évêques simoniaques(4).
403Déposition et exil de Jean Chrysostome
405Publication des poèmes de Prudence, l’un des premiers poètes chrétiens de langue latine.
406Grande invasion germanique en Gaule.
407Mort de Jean Chrysostome.
410Prise de Rome par Alaric. Pélage arrive à Carthage.
411Conférence de Carthage : condamnation du donatisme et du pélagianisme (5).
413Les Wisigoths occupent l’Aquitaine. Augustin commence La cité de Dieu.
415Arrivée de Jean Cassien en Gaule. Il fonde deux monastères à Marseille : un de moine, un de moniales.
419 ou 420Mort de Jérôme à Jérusalem.
428Nestorius(6) devient évêque de Constantinople.
429Les Vandales envahissent l’Afrique, sous la conduite de Genséric.
430Mort d’Augustin.
431Concile d’Ephèse (3e concile œcuménique) : déposition de Nestorius, condamnation de sa doctrine. Affirmation que Marie est Théotokos (Mère de Dieu). Condamnation de la doctrine de Pélage.

[Nous arrêterons momentanément la chronologie ici : à la mort d’Augustin et au Concile d’Ephèse, mais il conviendra de la reprendre un peu plus tard pour achever le Ve siècle, même si l’on peut noter que l’essentiel des événements très marquants s’est déjà déroulé.]

Quelques points importants :

Dans cette époque il convient de souligner deux temps/deux aspects tous deux aussi significatifs pour la foi chrétienne et qui ont leur source immédiate dans les rapports de l’Eglise et de l’Empire :

Ainsi cette époque constitue un tournant extraordinaire par rapport aux définitions des missions de l’Eglise : c’est aussi pourquoi elle est aussi si riche ! Par la suite, souvent se sépareront (dans le temps ou dans des confessions différentes) ces deux courants qui devraient être vécus ensemble par les chrétiens à tous moments ! Certes, comme le disait St Paul, tous ne sont pas prophètes, docteurs, etc. (c’est tous ensemble que nous formons le Corps du Christ)(7), on pourrait dire autrement que tous (hélas !) ne sont pas "prêtres, prophètes, et rois", mais c’est pourtant aussi avec ces trois mots que l’on résume le sens de notre baptême et le sens de la mission fondamentale de l’Eglise, et si elle s’articule en marturia, liturgia, diaconia, le plus important n’est précisément peut-être pas ses structures, son organisation, etc. L’évêque, certes, enseigne, veille à la sanctification du peuple qui lui est confié et le guide (mais devant certaines structures, certaines organisations, on se demande si l’on ne dévoie pas le terme d’"organisation" ou de "guide" !).

Pour lors donc, au IIIe siècle, l’Eglise s’organise, mais nous le verrons aussi, continue largement à être prophétique (cf. en particulier le monachisme, mais aussi le rôle des Pères, pasteurs et prédicateurs)… Nous consacrerons un chapitre complet – et c’est bien peu ! – au monachisme qui se développe alors de façon prodigieuse. Cette vocation paradoxale(8) de l’Eglise est magnifiquement résumée dans l’Epître à Diognète (texte de la fin du 2e siècle, juste au moment où commence "l’âge d’or" : 160-200 (?) d’un auteur anonyme), que les hommes de notre temps devraient toujours relire et méditer :

"… les Chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par les vêtements. Ils n’habitent pas de villes qui leur soient propres, ils ne se servent pas de quelque dialecte extraordinaire, leur genre de vie n’a rien de singulier. Ce n’est pas à l’imagination ou aux rêveries d’esprits agités que leur doctrine doit sa découverte ; ils ne se font pas comme tant d’autres, les champions d’une doctrine humaine. Ils se répartissent dans les cités grecques et barbares suivant le lot échu à chacun ; ils se conforment aux usages locaux pour les vêtements, la nourriture et la manière de vivre, tout en manifestant les lois extraordinaires et vraiment paradoxales de leur république spirituelle. Ils résident chacun dans sa propre patrie mais comme des étrangers domiciliés. Ils s’acquittent de tous leurs devoirs de citoyens et supportent toutes les charges comme des étrangers. Toute terre étrangère leur est une patrie et toute patrie une terre étrangère. Ils se marient comme tout le monde, ils ont des enfants, mais ils n’abandonnent pas leurs nouveau-nés. Ils partagent tous la même table, mais non la même couche. Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur la terre, mais sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies et leur manière de vivre l’emporte en perfection sur les lois.

Ils aiment tous les hommes et tous les persécutent. On les méconnaît, on les condamne ; on les tue et par là ils gagnent la vie. Ils sont pauvres et enrichissent un grand nombre. Ils manquent de tout et ils surabondent en toutes choses. On les méprise et dans ce mépris ils trouvent leur gloire. On les calomnie et ils sont justifiés. On les insulte et ils bénissent. On les outrage et ils honorent. Ne faisant que le bien, ils sont châtiés comme des scélérats. Châtiés, ils sont dans la joie comme s’ils naissaient à la vie. Les Juifs leur font la guerre comme à des étrangers ; ils sont persécutés par les Grecs et ceux qui les détestent ne sauraient dire la cause de leur haine.

En un mot, ce que l’âme est dans le corps, les Chrétiens le sont dans le monde. L’âme est répandue dans tous les membres du corps comme les Chrétiens dans les cités du monde. L’âme habite dans le corps et pourtant elle n’est pas du corps, comme les Chrétiens habitent dans le monde mais ne sont pas du monde."

(Lettre à Diognète, 5, 1 – 6, 3).

En tout cas, c’est pendant ces siècles qu’apparaît clairement déjà – et pour toujours – le sens paradoxal de la vie chrétienne – ce grand paradoxe que nous connaissons encore aujourd’hui et qui prend mille formes dans l’Eglise : comment en s’installant, s’organisant, prenant de la sécurité, de la puissance continuer à se rappeler que l’Eglise est toujours en marche ? Comment marcher sans s’arrêter ? Comment quitter les oasis pour avancer dans le désert ? Comment aller aux extrémités de la terre et comprendre que la vérité, qui n’est certes pas "mouvement pour le mouvement", mouvement "fou" et incontrôlé, ne s’atteint que dans la marche, et non pas dans la stabilité et le repli sur soi ; elle ne se découvre que dans l’abandon constant de ses positions et de ses certitudes, que dans l’élan qui nous pousse en avant à la suite du Christ. La vérité n’est jamais donnée une fois pour toutes, elle est recherche, elle est chemin, elle est le Chemin…

Soulignons encore qu’à cette époque des IIIe-Ve siècles, le régime de l’Eglise, malgré déjà parfois l’affirmation de la "primauté" du "patriarche" de Rome (Rome est le lieu où sont morts Pierre et Paul, etc.), reste celui des grands patriarcats, avec une autonomie importante de chaque patriarche. Les patriarcats principaux sont les sièges les plus anciens dont les titulaires jouissent d’une autorité plus grande. Quatre "grands" puis cinq : Jérusalem, Antioche, Alexandrie, Rome(9), Constantinople. C’est en tenant compte de cela qu’il faudra aborder la question des rapports entre Orient et Occident, déjà posée à cette époque (les séparations apparaissent ne serait-ce qu’à cause de la langue, mais aussi à cause des diverses façons de vivre la foi, à cause des rapports politiques dans un Empire à deux têtes, à cause des hérésies, différentes ici et là, à cause des "rivalités" de tous ordres, bien sûr…). Epoque de nombreux conciles et synodes qui se soucient de questions doctrinales et disciplinaires de l’Eglise (éclaircissement du dogme, donc des vérités contenues dans la révélation, établissement du calendrier liturgique, élaboration du droit ecclésiastique, résolution des questions en suspens…).

Quand on parle des Pères on verra qu’ils seront souvent rattachés d’une façon ou d’une autre à ces grands patriarcats, mais il ne faut pas ignorer l’importance pour la patristique d’autres grands centres dont l’influence est aussi majeure : on pense à la Cappadoce (avec les « Cappadociens » : Basile de Césarée, Grégoire de Nazianze, et Grégoire de Nysse), mais la Gaule joue également un rôle non négligeable : Lyon avec Irénée, Poitiers avec Hilaire, Tours avec Martin (v. 316-397)… et la Provence avec Honorat d’Arles (v. 370 – 430) qui en 410 fonde Lérins ; Jean Cassien (v. 350/60 – v. 433/40) fonde St-Victor à Marseille (vers 420) ; un peu plus tard c’est l’époque aussi de Césaire d’Arles, ancien moine de Lérins (v. 470 – 543)…).

Toutes ces questions seront à développer.

Eléments de plan :

Les Docteurs de l’Eglise
NomDatesProclamation
Athanase295-373Docteur grec
Basile le Grand330-379Docteur grec
Grégoire de Nazianze329-389Docteur grec
Jean Chrysostome349-407Docteur grec
Ambroise339-397Docteur latin
Augustin354-430Docteur latin
Jérôme340-420Docteur latin
Grégoire le Grand540-604Docteur latin
Hilaire315-3681851
Ephrem306-3731920
Cyrille de Jérusalem315-3861883
Cyrille d’Alexandrie370-4441883
Pierre Chrysologue380-4511729
Léon le Grand395-4611754
Isidore560-6361722
Bède le Vénérable673-7351899
Jean Damascène676-7501883
Pierre Damien1007-10721828
Anselme1033-11091720
Bernard1090-11531830
Antoine de Padoue1195-12311946
Thomas d’Aquin1225-12741568
Bonaventure1221-12741588
Albert le Grand1206-12801931
Catherine de Sienne1347-13801970
Thérèse d’Avila1515-15821970
Jean de la Croix1542-15911926
Pierre Canisius1521-15971925
Laurent de Brindisi1559-16191959
Robert Bellarmin1542-16211931
François de Sales1567-16221877
Alphonse-Marie de Liguori1696-17871871
Thérèse de Lisieux1873-18971997

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(1) On notera toutefois qu’un "Père" n’est pas seulement un théologien – il y en a de très grands à presque toutes les époques – c’est un prédicateur, un pasteur : il met ses connaissances théologiques au service du peuple dont il a la charge pour le faire avancer. On perçoit le rôle essentiel de la parole, de la dimension que comporte l’enseignement en lien avec la sanctification et le gouvernement (donc dans la pratique de la vie de l’Eglise).

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(2) Le donatisme : La grande période du donatisme est comprise entre 305 et 420. Cette hérésie naît à la suite des persécutions de Dèce, très violentes. Un premier schisme a lieu (Novatien) lorsque le pape décide de réadmettre les lapsi (apostats) de la persécution de Dèce. Les violentes luttes que le donatisme va entraîner vont sévèrement freiner l'élan missionnaire en Afrique du Nord. De fait, certains chrétiens ne veulent pas admettre la réintégration au sein de la communauté de ceux qui ont apostasié (renié leur foi) pour échapper au martyre, et ils s'élèvent aussi contre les évêques qui auraient laissé détruire des livres saints des églises (les "traditores" : ceux qui ont trahi). L'évêque Donat, particulièrement virulent, va donner son nom au mouvement. Lors de l'ordination de l'évêque Cécilien, les schismatiques vont élire Donat à sa place, considérant l'ordination de Cécilien comme non valide car l'un des trois évêques qui l'ont ordonné était présumé "apostat". Le mouvement prend alors une grande ampleur, avec des doubles nominations d'évêques, des "rebaptisations" (les Donatistes considèrent les sacrements comme non valides si l'évêque qui les a donnés est soupçonné de traîtrise) et des actes de violence. L'empereur Constantin va alors édicter une loi contre les schismatiques en 317. La répression sera sévère jusqu'en 321 et leur vaudra de nombreux "martyrs". Les conflits et violences vont durer tout le quatrième siècle et même au-delà. Saint Augustin lui-même va entrer dans la controverse (394-420). L'Église est alors amenée à préciser que les sacrements donnés par un prêtre sont valides quelle que soit l'indignité du ministre en question.

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(3) Au départ, l’arianisme est une doctrine prônée par Arius (prêtre d'Alexandrie au début du IVe siècle), qui niait la divinité de Jésus-Christ, soutenait que les substances des trois personnes de la Trinité sont distinctes, sans relation entre elles, et reconnaissait au Père seul la qualité d'éternel : le Fils est une créature de Dieu, plus exceptionnelle que les autres, mais créature quand même. Face à son affirmation "le Verbe est créé", le Concile de Nicée trouve la formulation "engendré, non pas créé, de même nature que le Père et par lui tout a été fait.".
L'arianisme, qui causa des troubles graves sur les plans religieux et politique, fut condamné par le concile de Nicée (325) et par celui de Constantinople (381). Mais cela ne suffit pas à éradiquer l'arianisme qui continua à sévir longtemps dans l'Eglise.

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(4) La simonie est l’achat ou la vente de biens spirituels (cf. par exemple les sacrements), le trafic aussi de charges ecclésiastiques. Elle doit son nom à Simon le Magicien dans les Actes qui voulut acheter à Pierre son pouvoir de faire des miracles (Actes, 8, 9-21), ce qui lui valut la condamnation de l’apôtre : "Que ton argent périsse avec toi, puisque tu as cru que le don de Dieu s’acquérait à prix d’argent !".

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(5) Pélage est un hérésiarque d'origine irlandaise (Grande-Bretagne, v. 360 — Palestine, v. 422) qu'Augustin a longuement combattu pour des thèses que l’évêque d’Hippone percevait comme dangereuses pour la foi chrétienne. Le pélagianisme, doctrine réfutée par saint Augustin, fut condamné par les conciles de Carthage (412 et 416) et de Milève (416). Pélage rejette notamment le péché originel et la grâce, insistant sur le rôle du libre arbitre ; Augustin a clairement dénoncé ce que le pélagianisme a de pervers au plan de la doctrine chrétienne du salut, en niant de fait la nécessité de la grâce, et en enlevant tout "intérêt" à l'Incarnation du Christ : celle-ci devient inutile si l'homme peut se sauver seul.

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(6) Nestorius (v. 380-451) est à l’origine du nestorianisme : pour essayer d'expliquer les deux natures dans le Christ, il affirme l'existence de deux personnes, l'une divine, le Fils du Père, l'autre humaine, le fils de Marie. Il refuse de ce fait à Marie le titre de "Mère de Dieu". C'est ainsi qu'affirmant la maternité divine de Marie à Ephèse en 431, le concile condamne en même temps le nestorianisme et proclame l'union des deux natures dans la personne du Fils.

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(7) Eph. 4, 11-13 : "C'est lui encore qui "a donné" aux uns d'être apôtres, à d'autres d'être prophètes, ou encore évangélistes, ou bien pasteurs et docteurs, organisant ainsi les saints pour l'oeuvre du ministère, en vue de la construction du Corps du Christ, au terme de laquelle nous devons parvenir, tous ensemble, à ne faire plus qu'un dans la foi et la connaissance du Fils de Dieu, et à constituer cet Homme parfait, dans la force de l'âge, qui réalise la plénitude du Christ."

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(8) Nombreux sont les textes des Pères qui ont souligné le caractère paradoxal de la vie et de la foi chrétienne. On peut lire à ce propos le très bel ouvrage de Pierre Descouvemont, 2003 : Les apparents paradoxes de Dieu, Presses de la Renaissance.

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(9) C’est le pape Damase (366-384) qui le premier appelle l’Eglise de Rome "Siège apostolique". Gélase 1er (492-496) – fin de notre "âge d’or" - précise pour la première fois que le siège romain a le droit de juger toutes les autres Eglises, mais qu’il ne peut être soumis lui-même à aucune autre juridiction ecclésiastique.

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Ce site a été réalisé et est remis à jour par Marie-Christine Hazaël-Massieux.