Textes des Pères pour une méditation de Carême

Jean Chrysostome

Quand Jésus va être tenté...

"…c’est après la descente du Saint-Esprit sur Jésus, après que cette voix divine se fut fait entendre du ciel : C'est là mon fils bien-aimé dans lequel j'ai mis toute mon affection..Qui n'admirera, mes frères, que l'Esprit de Dieu ait conduit Jésus-Christ dans le désert, afin d'y être tenté par le démon ? Car c'est le Saint-Esprit lui-même qui l'y a conduit. Comme Jésus-Christ était venu au monde pour nous servir de modèle, et avait résolu pour cela de tout faire et de tout souffrir, il veut bien se laisser aussi conduire dans le désert, et lutter contre le démon ; afin que les nouveaux baptisés se voyant pressés de quelques grandes tentations après le baptême, n'entrent point dans le trouble et le découragement, comme s'il leur était arrivé quelque chose contre leur attente, mais qu'ils souffrent cette épreuve avec constance, comme une suite nécessaire de la profession qu'ils ont embrassée.

Vous avez reçu des armes, non pour demeurer dans un lâche repos, mais pour combattre. Si Dieu n'arrête point les tentations dont vous êtes attaqués, il le fait pour plusieurs raisons qui vous sont avantageuses. Car premièrement il veut que vous reconnaissiez par expérience que vous êtes devenu plus fort. Il veut encore que vous conserviez la modestie, et que la grandeur des grâces reçues ne vous enfle pas d'orgueil, vous qui êtes encore exposés à l'épreuve des tentations. Dieu permet aussi que vous soyez-tentés afin que le démon qui doute toujours si c'est sincèrement que vous avez renoncé à lui, s'assure par votre patience que ce renoncement est véritable. De plus le dessein de Dieu est que votre âme se fortifie par la tentation, et qu'elle devienne aussi plus ferme que le fer. Enfin Dieu permet que l'ennemi vous attaque, afin que vous conceviez par là combien est grand et précieux le trésor qui vous a été confié. Car le démon ne vous attaquerait point avec tant de violence, s'il ne vous voyait élevés en un état plus glorieux que vous n'étiez auparavant. C'est ce qui l'irrita autrefois contre Adam, lorsqu'il le vit dans une si grande gloire. C'est encore ce qui l'irrita contre Job de voir que Dieu même lui donnait tant de louanges.

Mais d'où vient donc, me direz-vous, que Jésus-Christ nous a dit: Priez afin que vous n'entriez point dans la tentation (Mt 26,30) ? Je vous réponds que cette parole s'accorde parfaitement avec ce que nous disons puisqu'il est marqué dans notre Evangile que Jésus-Christ n'alla pas de lui-même dans le désert, mais qu'il y fut conduit par l'Esprit. Ce qui nous montre admirablement que nous ne devons pas nous jeter de nous-mêmes dans les tentations, mais seulement les souffrir avec courage, lorsqu' elles nous arrivent.

Et remarquez, je vous prie, où le Saint-Esprit mène le Sauveur. Ce n'est point dans une ville, ni dans une place publique, mais dans le désert. Comme il voulait attirer le démon à ce combat, il ne lui en donne pas seulement l'occasion par la faim et par le jeûne; mais encore par la solitude. Car le démon attaque bien davantage les hommes lorsqu'il les voit seuls et séparés de tous les autres. Ce fut ainsi qu'il attaqua Eve autrefois, lorsqu'il la vit seule et séparée d'Adam. Quand il nous voit unis avec d'autres, il n'a pas la même hardiesse. Et c'est pour cette raison que nous devons nous trouver le plus souvent que nous pouvons dans la compagnie des gens de bien, afin de n'être pas si exposés aux attaques de notre ennemi

Ainsi le diable va trouver Jésus-Christ dans le fond d'un désert inaccessible, ce que saint Marc fait assez voir lorsqu'il dit: qu'il était avec les bêtes (Mc 1,13). Et considérez avec quelle malice il l'attaque, et comme il sait prendre son temps. Il le tente non durant son jeûne, mais lorsqu'il est ensuite pressé de la faim ; afin que nous apprenions quel grand bien c'est que le jeûne ; que c'est l'arme la plus forte que nous ayons pour combattre le démon, et qu'après le baptême un chrétien ne doit plus s'adonner à la bonne chère, aux délices des festins, mais aux jeûnes et à l'abstinence. C'est pour cela que Jésus-Christ jeûne ; non qu'il eût aucun besoin de jeûner, mais pour nous instruire de notre devoir. Comme les péchés que nous avions commis avant le baptême avaient pour cause l'intempérance dont nous étions les esclaves, Jésus-Christ nous commande de jeûner après le baptême. Et il fait en cela comme un sage médecin, qui, après avoir guéri un malade, lui ordonne de s'abstenir de ce qui lui avait causé son mal."

(Jean Chrysostome : Commentaire sur Matthieu, Homélie 13, 1, à propos de Mt 4, 1-11 : lecture du 1er dimanche de Carême, année A).

Texte étonnant pour nos contemporains : Jean Chrysostome écrit au IVe siècle, et les pratiques du baptême, de la pénitence, ne sont pas les mêmes que les nôtres, alors qu'aujourd'hui a souvent disparu la notion de "tentation", l'idée de péché, et surtout le sens même du pardon !
Que veut dire Jean Chrysostome, avec ce texte, qui n'est qu'un tout petit extrait d'un
sermon encore plus long ? Jean, évêque d'Antioche, puis de Constantinople, veut déjà faire comprendre à ses fidèles la difficulté que l'on a toujours à imaginer que Jésus, le Fils de Dieu, qui est sans péché, puisse être tenté, comme chacun d'entre nous.

Quelles sont les tentations de l'homme aujourd'hui : satisfaire ses pulsions, bien sûr, au moment où elles se font vives (quand il est privé ?), ou même avant qu'elles ne soient vives (insupportable d'être frustré !). Comment se passer de ce dont on est "accro" ? Le Carême peut être une occasion de trouver ou retrouver la liberté perdue.
N'est-ce pas cette liberté de l'homme qu'ainsi affirme Jésus en rejetant les tentations du démon : tentations de montrer sa puissance, tentations d'affirmer son pouvoir, tentations de donner de soi une image qui fait envie, une image qui nous fait apparaître plus grand, plus fort que les autres, plus "branché"... et qui, lorsque nous y cédons, ne mènent vite qu'à la déception (nous obligeant toujours à chercher plus de prestige, plus de gloire), ces attitudes qui font souffrir les autres, et qui ne satisfont pas vraiment celui qui croit qu'ainsi il sera heureux.
Nous les connaissons ces tentations, nous connaissons aussi le jeûne pour tenter de réfléchir aux addictions : même internet organise des "journées sans face-book" !
Alors de quoi allons-nous jeûner pendant le Carême ? De quoi allons-nous nous priver (un peu !!!) pour découvrir que la vraie vie est autre chose que ce que nous croyons obligatoire, autre chose que les esclavages constants que nous nous donnons ? On pense souvent que c'est l'autre qui nous réduit en esclavage, mais combien souvent c'est nous-mêmes qui choisissons de nous placer sous la coupe d'un maître tout-puissant, qui nous restreint, qui nous impose des limites ?
Le carême comme un chemin vers la liberté ? Le carême au moins comme une étape où nous reprenons possession de nous-même avec Celui qui nous a aimés au point d'accepter de se laisser tenter, dans le silence et la solitude, pour que nous puissions mieux, nous qui préférons le bruit du monde qui nous semble indispensable mais nous étourdit chaque jour davantage, découvrir la vraie force de l'homme et la vraie liberté... ?
Relisons aussi cette parole : "Pour toi, quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la porte, et prie ton Père qui est là, dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra" (Mt 6, 6) et comprenons où est la chambre la plus secrète de notre vie, de notre coeur : c'est là qu'est notre vrai désir et notre vraie joie !

Retour pour relire Jean Chrysostome

Pierre le Vénérable (v. 1092-1156)

"Son visage resplendit comme le soleil(Mt 17, 2)… Revêtue de la nuée de la chair, aujourd’hui la lumière qui éclaire tout homme (Jn 1, 9) a resplendi. Aujourd’hui elle glorifie cette même chair, elle la montre déifiée aux apôtres pour que les apôtres la révèlent au monde. Et toi, cité bienheureuse, tu jouiras éternellement de la contemplation de ce Soleil, quand tu 'descendras du ciel, parée par Dieu comme l’épouse pour son époux' (Ap 21, 2). Jamais plus ce Soleil ne se couchera pour toi ; éternellement lui-même, il fera rayonner un matin éternel. Ce Soleil ne sera plus jamais voilé d’aucun nuage, mais brillant sans cesse, il te réjouira d’une lumière sans déclin. Ce Soleil n’éblouira plus tes yeux mais te donnera la force de le regarder et t’enchantera de sa splendeur divine… 'Il n’y aura plus ni mort ni deuil, ni cri ni peine' (Ap 21, 4) qui puisse assombrir l’éclat que Dieu t’a donné car, comme il a été dit à Jean : 'L’ancien monde s’en est allé'.
Voilà le Soleil dont parle le prophète : 'Tu n’auras plus besoin du soleil pour t’éclairer ni de la lune pour t’illuminer, mais le Seigneur ton Dieu sera ta lumière pour toujours' (Is 60, 19). Voilà cette lumière éternelle qui resplendit pour toi sur le visage du Seigneur. Tu entends la voix du Seigneur, tu contemples son visage resplendissant, et tu deviens comme le soleil. Car c’est à son visage qu’on reconnaît quelqu’un, et le reconnaître, c’est comme en être illuminé. Ici-bas tu crois dans la foi ; là tu reconnaîtras. Ici tu saisis par l’intelligence ; là tu seras saisie. Ici tu vois 'comme dans un miroir' ; là tu verras 'face à face' (1 Co 13, 12)… Alors s’accomplira ce désir du prophète : 'Qu’il fasse resplendir sur nous son visage' (Ps 66, 2)… Dans cette lumière tu te réjouiras sans fin ; dans cette lumière, tu marcheras sans fatigue. Dans cette lumière, tu verras la lumière éternelle."
(Sermon 1 pour la Transfiguration).

La Transfiguration est l'une des grandes fêtes de l'Orthodoxie : le 6 août, soit juste quarante jours avant cette autre grande fête qu'est celle de la "Croix glorieuse", le 14 septembre... En août dans le monde occidental, cette célébration, prise dans les "grandes vacances", n'est que bien peu remarquée par beaucoup de chrétiens au mois d'août. Il est heureux que la liturgie du deuxième dimanche de Carême (année A) nous permette de méditer sur cet évangile dans lequel Jésus fait découvrir à trois de ses apôtres la lumière de Dieu, qui engloutit la mort, puisqu'apparaissent à leurs yeux éblouis Moïse et Elie.

Avec Pierre, Jacques et Jean, nous sommes là, face au mystère de Dieu. Pour nous trouver face à face avec Jésus transfiguré il faut gravir la montagne : comme toujours c'est sur la montagne que nous est révélée la vérité de Dieu : dans l'Ancien Testament c'est sur le Sinaï que Moïse reçoit les tables de la loi, dans le Nouveau Testament c'est sur une "haute montagne" que Jésus proclame les béatitudes à toute une foule assemblée, et c'est sur le Golgotha qu'il rendra l'Esprit, sauvant les hommes que l'arbre avait perdu dans le jardin d'Eden, par l'arbre de la Croix. Le fruit de ce nouvel arbre, donne sa vie pour le salut de tous. Désormais tout est lumière, ce qu'annonce le récit de la Transfiguration.

Au sommet de notre propre coeur, c'est là que nous trouvons Dieu lorsque nous voulons faire l'effort d'y monter. Pour cela il ne faut pas avoir peur de la lumière du Christ, ouvrir notre regard purifié pour que rien ne fasse obstacle au rayonnement de l'amour. Mais comment atteindre le haut quand tant de souci semblent nous tirer vers le bas : souffrance, épreuves, perte du sens qui nous fait regarder la terre plutôt que le ciel... Augustin nous précise pourtant :

"Un corps, en vertu de son poids, tend à son lieu propre.
Le poids ne va pas forcément en bas mais au lieu propre.
Le feu tend vers le haut, la pierre vers le bas :
Ils sont menés par leur poids, ils s’en vont à leur lieu.
L’huile versée sous l’eau s’élève au-dessus de l’eau ;
L’eau versée sur l’huile s’enfonce au-dessous de l’huile :
Ils sont menés par leur poids, ils s’en vont à leur lieu.
S’il n’est pas à sa place, un être est sans repos :
Qu’on le mette à sa place et il est en repos.

Mon poids, c’est mon amour ;
C’est lui qui m’emporte où qu’il m’emporte.
Le don de toi nous enflamme et nous emporte en haut ;
Il nous embrase et nous partons
Nous montons les montées qui sont dans notre cœur
Et nous chantons le cantique des degrés.

Ton feu, ton bon feu nous embrase et nous partons,
Puisque nous partons en haut vers la paix de Jérusalem,
Puisque j’ai trouvé ma joie dans ceux qui m’ont dit :
Nous partirons pour la maison du Seigneur.
Là nous placera la bonne volonté
De sorte que nous ne voulions plus autre chose
Qu’y demeurer éternellement."
(Confessions, XIII, 9, 10).

Retour pour relire Pierre le Vénérablee

Augustin (3e dimanche de Carême année A)

"Le Seigneur parle [à la Samaritaine] de cette eau vive en termes plus clairs. Cette femme lui avait dit : Etes-vous plus grand que notre père Jacob, qui nous a donné ce puits ; et lui-même en a bu, et ses enfants, et ses troupeaux ? En d’autres termes : vous ne pouvez me donner de cette eau vive, car vous n’avez pas de vase pour en puiser ; sans doute celle que vous me promettez a sa source ailleurs. Pensez-vous donc valoir mieux que notre père, qui a creusé ce puits pour son usage et celui des siens ? C’est le moment que le Seigneur lui explique ce qu’il entend par eau vive. Jésus lui répondit : Quiconque boira de cette eau aura encore soif ; mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura jamais soif, et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source jaillissante pour la vie éternelle. Ici le langage de Notre-Seigneur est plus clair : Cette eau deviendra en lui une source pour la vie éternelle. Celui qui boira de cette eau n’aura jamais soif. Etait-il possible de marquer plus clairement que s’il promettait de l’eau, c’était une eau invisible, et non pas une eau visible ; qu’il parlait selon l’esprit et non selon la chair ?

Néanmoins cette femme comprend encore les choses dans un sens charnel ; heureuse de penser qu’elle n’aurait plus soif, elle supposait que le Sauveur lui avait fait une pareille promesse dans le sens matériel : sans doute cette promesse se réalisera un jour, mais au jour de la résurrection des morts. La Samaritaine voulait la voir s’accomplir immédiatement. Aussi bien Dieu avait autrefois donné à son serviteur Elie de demeurer quarante jours sans éprouver ni faim, ni soif (1 Rois, 19, 8). Celui qui a pu accorder une pareille grâce pendant quarante jours, ne peut-il pas l’accorder toujours ? Elle soupirait donc, ne voulant ni manquer d’eau, ni s’en procurer avec tant de fatigue. Venir continuellement à cette fontaine, s’en retourner chargée de la provision nécessaire pour subvenir à ses besoins; puis, cette provision épuisée, se voir de nouveau contrainte à revenir, c’était là son travail de tous les jours, parce que cette eau qui soulageait la soif - ne l’éteignait pas. Joyeuse de la promesse que lui fait le Christ de cette eau vive, elle demande au Seigneur de la lui donner.

Toutefois, n’oublions pas que le Sauveur lui promettait un don spirituel. Qu’est-ce à dire : Celui qui boira de cette eau aura encore soif ? Parole véritable, si on l’applique à cette eau véritable encore, si on l’applique à ce dont elle était la figure. L’eau, au fond de ce puits, c’est la volupté du siècle dans sa ténébreuse profondeur. La cupidité des hommes, voilà le vase qui leur sert à y puiser. Leur cupidité les fait pencher vers ces profondeurs jusqu’à ce qu’ils en touchent le fond et y puisent le plaisir ; mais toujours la cupidité marche et précède. Car celui qui ne fait pas d’abord marcher la cupidité ne peut arriver au plaisir. Supposez donc que la cupidité est le vase avec lequel on puise, et que l’eau que l’on doit tirer du puits c’est le plaisir lui-même, et le plaisir mondain que l’on goûte, c’est le boire, le manger, le bain, les spectacles, l’impureté ; celui qui s’y adonne n’en sera-t-il plus désormais altéré ? Donc Jésus dit avec raison : Celui qui boira de cette eau aura encore soif ; mais si je lui donne de mon eau, il n’aura jamais soif. Nous serons rassasiés, a dit le Prophète, de l’abondance des biens de votre maison (Ps. 114, 5). De quelle eau donnera donc le Sauveur, sinon de celle dont il est écrit: En vous est la source de vie ? Comment, en effet, auront soif ceux qui seront enivrés de l’abondance de votre maison (Ps. 35, 10, 9) ?

Ce que promettait donc Notre-Seigneur, c’était la plénitude et la satiété dont le Saint-Esprit est l’auteur. La Samaritaine ne le comprenait pas encore, et dans son intelligence que répondait-elle ? Cette femme lui dit : "Seigneur, donnez-moi de cette eau, afin que je n’aie plus soif et que je ne vienne plus ici pour en tirer". Travail pénible auquel la contraignaient ses besoins et qui rebutait sa faiblesse. Si seulement elle entendait ces paroles : Venez à moi, vous tous qui travaillez et qui êtes chargés, et je vous soulagerai (Matth. 11, 28) ! Car ce que lui promettait Jésus, c’était la délivrance de sa peine ; mais elle ne le comprenait pas encore."

Commentaire de l'Evangile de la Samaritaine, dans les Homélies sur l'Evangile de Jean XV, 14-17 (Bibliothèque Augustienne, 73A)

Pour lire un autre extrait de cette homélie XV.

"Jésus promet la plénitude et la satiété dont le Saint-Esprit est l'auteur"... On a envie de s'arrêter simplement sur cette phrase qui ne peut que toucher notre coeur, et tout particulièrement pendant le Carême. Jésus promet la plénitude... Jésus promet d'apaiser notre soif, toutes nos soifs... Et Dieu sait si elles sont nombreuses nos soifs !

Savons-nous d'ailleurs quelles sont nos soifs ? Ce n'est pas si sûr ! Nou ignorons souvent nos vraies soifs, et sommes bien incapables de demander "l'eau vive". C'est pourtant ce que, à la suite de la Samaritaine, nous devrions désirer. Sommes-nous encore capables de désir dans un monde où l'on nous promet quotidiennement de satisfaire toutes nos envies... avant même qu'elles aient été formulées ? A la différence des "marchands du temple" de notre société, le Christ veut que nous désirions... et que nous demandions la profusion à celui qui veut nous la donner.

Le puits, lieu de rencontre dans toute la Bible, est ainsi lieu de l'amour, lieu où l'Alliance d'Isaac et de Rébecca se noue (Gn 24, 1-67), lieu de toutes les alliances. Les mariages, rapportés ou non dans la Bible, vont se préparer près de la source car le puits est aussi le lieu de l'eau et de la vie ; lieu de la lumière également quand on est à la sixième heure (midi), en plein soleil... La rencontre de Jésus avec la Samaritaine qui ne pouvait avoir lieu que là, montre toutes les significations de ce lieu où la profusion de Dieu sans cesse se révèle...

Alors que demandons-nous pour notre Carême ? De bien jeûner ou de bien aimer ? de courir tout au long du jour, ou de nous arrêter au puits pour nous désaltérer ? Sans doute le puits est-il profond, sans doute faut-il creuser car notre coeur est encombré de tous les faux désirs qui ont obstrué la source. Mais elle est là, toujours aussi vive, car c'est lui-même que le Seigneur veut donner à tous ceux qui ont soif !

"Et si quelqu'un connaît la soif, s'il croit en Moi qu'il vienne et boive !
Et de son sein l'eau jaillira comme un torrent d'eau vive :
Jésus parlait de l'Esprit Saint qu'il donnerait à ceux qui croient."
(Liturgie du peuple de Dieu, choral de la Samaritaine).

Retour pour relire le sermon d'Augustin

Augustin (4e dimanche de Carême année A)

"En guérissant l'aveugle-né et surtout en ouvrant son âme à la lumière de la vérité, le Sauveur faisait entendre qu'il était venu dissiper l'aveuglement des Juifs. Les Juifs prenaient la loi trop à la lettre et ils n'en connaissaient pas l'impuissance. Il a fallu que Jésus-Christ vint en enseigner l'esprit et donner la vie aux hommes en se faisant homme comme eux. Heureux qui profite de son enseignement et de ses grâces !

Nous avons entendu, comme à l'ordinaire, cette lecture du saint Evangile; mais il est bon de ranimer nos souvenirs et de les préserver de l'assoupissement qu'engendre l'oubli. D'ailleurs, ce passage que nous connaissons depuis si longtemps nous a fait autant de plaisir, que s'il eût été nouveau pour nous.

Pourquoi vous étonner que le Christ ait fait voir la lumière à l'aveugle-né ? Le Christ est notre Sauveur; il a accordé à cet homme, comme un bienfait, ce qu'il ne lui avait pas donné en le créant. Se méprenait-il alors en ne lui donnant pas des yeux ? Non, il voulait plus tard lui en donner miraculeusement. - Comment le sais-tu, demanderez-vous ? - Je l'ai appris de lui-même ; il vient de le dire encore et nous l'avons tous entendu. Ses disciples, en effet, lui ayant demandé : "Seigneur, qui a péché, celui-ci ou ses, parents, pour qu'il soit né aveugle ?" il répondit, comme vous venez de l'entendre avec moi": "Ni celui-ci n'a péché, ni ses parents ; mais c'est pour la manifestation en lui des oeuvres de Dieu." Voilà pour quel motif il avait différé de lui donner des yeux. Il ne lui en avait pas donné, parce qu'il devait lui en donner plus tard, parce qu'il savait qu'il lui en donnerait au moment opportun.

Ne pensez pas, mes frères, que ses parents aient été sans péché ou qu'il n'ait pas lui-même contracté en naissant le péché originel, pour la rémission duquel on confère aux enfants le baptême destiné à effacer les péchés. Mais sa cécité ne fut l'effet ni du péché de ses parents, ni de son péché propre ; elle devait servir à manifester en lui les oeuvres de Dieu. Aussi bien, quoi que nous ayons tous en naissant contracté la souillure originelle, nous ne sommes pas nés aveugles. Et toutefois en y regardant de près, nous sommes des aveugles de naissance. Qui de nous en naissant n'était aveugle, mais aveugle de coeur ? Créateur de l'âme et du corps, le Seigneur Jésus a guéri l'un et l'autre.

La foi vous a montré cet homme aveugle d'abord, puis voyant la lumière : vous l'avez vu aussi dans l'erreur. Son erreur consiste premièrement à regarder le Christ comme un prophète, à ignorer qu'il est le Fils de Dieu. Il a fait aussi une réponse certainement fausse lorsqu'il a dit : "Nous savons que Dieu n'exauce pas les pécheurs." Si Dieu n'exauce pas les pécheurs, quel espoir nous reste-t-il ? Si Dieu n'exauce pas les pécheurs, pourquoi le prions-nous, pourquoi confessons-nous nos péchés en nous frappant la poitrine ? Que faire de ce Publicain qui monta au temple avec le Pharisien et qui se tenant éloigné et les yeux fixés à terre se frappait la poitrine et confessait ses péchés, pendant que le Pharisien vantait et étalait ses mérites ? Le Publicain pourtant, après avoir confessé ses fautes, sortit du temple justifié, plutôt que le Pharisien (Lc 18, 10-14). N'est-ce pas une preuve que Dieu exauce les pécheurs ? Mais l'aveugle en parlant ainsi ne s'était point encore lavé l'oeil du coeur à Siloé. Déjà il s'était mis sur les yeux la boue mystérieuse ; mais la grâce n'avait point produit encore son effet dans le coeur. Quand se lava-t-il l'oeil du coeur ? Quand après avoir été chassé par les Juifs il fut appelé par le Seigneur. Le Seigneur en effet le rencontra et lui dit : "Crois-tu au Fils de Dieu ? - Quel est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ?" Il le voyait des yeux du corps ; le voyait-il des yeux du coeur ? Non ; mais attendez, il le verra bientôt. Jésus lui répondit effectivement : "C'est moi, moi qui te parle." Cet homme douta-t-il ? - A l'instant même il se lavait l'âme, puisqu'il communiquait avec Siloé, c'est-à-dire avec l'Envoyé. Et quel est l'Envoyé, sinon le Christ ? Lui-même l'a répété plusieurs fois. "Je fais, disait-il, la volonté de mon Père qui m'a envoyé (Jn 4, 34 ; Jn 5, 30 ; Jn 6, 38)." C'est ainsi qu'il est Siloé, et en s'approchant de lui, en l'écoutant, en le croyant, en l'adorant, cet aveugle se purifia le coeur et recouvra la vue.

Augustin : Sermon 136, 1-2.

"Est-ce lui ou ses parents qui ont péché ?" Dans le monde qui nous est présenté dans cet évangile, on croit effectivement que la maladie est la conséquence du péché : une punition de Dieu en quelque sorte. Aujourd'hui encore d'ailleurs n'entend-on pas parfois ? "Mais qu'est-ce que j'ai fait au Bon Dieu pour qu'il m'envoie autant de malheurs ?"

Le "bon" Dieu, n'envoie jamais le mal ! Lui-même en Jésus a connu ce mal jusqu'à l'extrême, alors que précisément il était le Bon, le Bien... Il est vrai que certains ont pu affirmer que Dieu le Père punissait son Fils ! De quel crime ? On serait bien en peine de le dire - lui qui était sans péché ! Dieu ne veut que du Bien à l'homme, et à tous les hommes... or nous sommes tous pécheurs, et ce nom ne peut être réservé à certains seulement. Nous en savons quelque chose nous qui au quotidien délaissons Dieu, et non pas même pour nous attacher à nos frères - ce qui à l'occasion nous servirait d'excuse... mais également pour délaisser nos frères car l'attention aux frères entraîne l'attention à Dieu, et l'attention à Dieu rapproche de nos frères.

Comment savons-nous que Dieu ne nous punit pas pour nos péchés ? Parce que lui-même nous l'a dit, quand, devançant les idées fausses de ceux qui l'entouraient (les scribes) et qui avaient vu qu'on faisait descendre le paralytique par le toit car la foule compacte empêchait toute autre approche de Jésus (Mt 9, 2-7), celui-ci s'adresse à tous en même temps qu'au paralytique :

"Jésus, voyant leur foi, dit au paralytique : "Aie confiance, mon enfant, tes péchés sont remis." Et voici que quelques scribes se dirent par-devers eux : "Celui-là blasphème." Et Jésus, connaissant leurs sentiments, dit : "Pourquoi ces mauvais sentiments dans vos coeurs ? Quel est donc le plus facile, de dire : Tes péchés sont remis, ou de dire : Lève-toi et marche ? Eh bien! pour que vous sachiez que le Fils de l'homme a le pouvoir sur la terre de remettre les péchés, lève-toi, dit-il alors au paralytique, prends ton lit et va-t-en chez toi." Et se levant, il s'en alla chez lui."

Dieu ne nous punit pas pour nos péchés ; et la guérison de l'aveugle-né manifeste qu'il veut nous guérir aussi de notre aveuglement moral... si du moins nous voulons bien en sortir. Car précisément, c'est notre aveuglement moral qui est en cause au quotidien, c'est lui qui nous empêche de voir que l'amour véritable de nos frères est chemin vers Dieu, tandis que regarder vers Dieu - ce qui nous transforme et nous illumine -, nous rapproche également de nos frères.

N'est-ce pas ce que disait le moine Dorothée de Gaza au VIe siècle ?

"Plus on est uni au prochain, plus on est uni à Dieu. Pour que vous compreniez le sens de cette parole, je vais vous donner une image tirée des Pères. Supposez un cercle tracé sur la terre, c’est-à-dire une ligne tirée en rond avec un compas et un centre. On appelle précisément centre le milieu du cercle. Appliquez votre esprit à ce que je vous dis. Imaginez que ce cercle, c’est le monde ; le centre, Dieu ; et les rayons, les différentes voies ou manières de vivre des hommes. Quand les saints, désirant approcher de Dieu, marchent vers le milieu du cercle, dans la mesure où ils pénètrent à l’intérieur, ils se rapprochent les uns des autres en même temps que de Dieu. Plus ils s’approchent de Dieu, plus ils se rapprochent les uns des autres, et plus ils se rapprochent les uns des autres, plus ils s’approchent de Dieu. Et vous comprenez qu’il en est de même en sens inverse, quand on se détourne de Dieu pour se retirer vers l’extérieur : il est évident alors que, plus on s’éloigne de Dieu, plus on s’éloigne les uns des autres, et que plus on s’éloigne les uns des autres, plus on s’éloigne aussi de Dieu. Telle est la nature de la charité."

Alors, demandons au Seigneur d'illuminer les yeux de notre coeur, de nous rendre la vue, à nous qui ne voyons pas notre péché... et notre aveuglement demeure !

Retour pour relire le sermon d'Augustin sur l'aveugle-né.

Origène (5e dimanche de Carême année A)

Que penser du Sauveur et Seigneur qui fait cette prière "Père, je te rends grâces de m'avoir exaucé ; moi je savais que tu m'exauces toujours ; mais j'ai parlé à cause de la foule qui m'entoure, pour qu'ils croient que c'est toi qui m'as envoyé", alors que cette promesse a été donnée à tous ceux qui prient comme il faut, tout en étant dans le monde ? Origène répond :

"[Jésus] avait l'intention de prononcer une prière de demande ; mais celui qui pourrait lui dire : "Avant que tu parles, je dirai : 'Me voici'" (Is 58, 9), devança sa demande et, au lieu de la demande qu'il avait l'intention de prononcer, Jésus adressa son action de grâces à celui qui avait devancé sa prière et, parce qu'il était exaucé en ce qu'il pensait seulement, mais sans l'avoir exprimé dans sa prière, il dit : "Père, je te rends grâces de m'avoir exaucé." Il allait donc prier pour la résurrection de Lazare et Dieu, qui seul est bon, le Père, devançant sa prière, entendit les paroles qu'il allait prononcer dans sa prière : c'est pourquoi, au lieu d'une prière de demande, le Sauveur fait monter une action de grâces, de façon à être entendu de la foule qui l'entoure ; car il poursuit deux objectifs à la fois : rendre grâces de ce qu'il a obtenu en faveur de Lazare et inciter à la foi la foule qui l'entoure ; car il voulait leur faire admettre que c'était bien comme envoyé de Dieu qu'il résidait en cette vie." (Origène : Commentaire sur S. Jean, XXVIII, 39-42).

Avec Jésus, l'ordre du monde est transformé. Origène nous donne ici un magnifique exemple de ce qu'est pour Dieu la prière de demande : cette prière de demande de l'homme si fréquente, et si nécessaire, est déjà action de grâce : Augustin nous explique que la prière de demande n'est pas là pour dire à Dieu ce que nous désirons, car il le sait déjà, mais pour exciter en nous le désir, pour élargir notre coeur pour qu'il puisse accueillir tout ce que Dieu veut lui donner, et qui est plus grand que nos pauvres demandes, car il veut se donner lui-même.

N'hésitons pas à prier pour tout demander à Dieu ! Mais n'oublions pas cette réponse de Dieu, "Me voici", qui précède notre parole et notre demande. Par là, Origène nous dit quelque chose du pardon donné à l'homme pécheur : même si l'on ne peut citer ici qu'un court extrait du très long commentaire d'Origène, nous en retiendrons ce qu'implique le fait que le don de Dieu précède notre demande. Origène nous montre que pour Jésus (quant à lui sans péché), sa demande à son Père est, de façon étonnante, déjà action de grâce ; et il est là notre modèle. Dès avant même notre repentir, Dieu nous a donné son pardon. L'amour du Christ vient nous trouver jusque dans notre péché, nous aide à le voir, et à le rejeter : comme le dit Paul : "Dieu l’a fait péché pour nous" (2 Co 5, 21). Fort de son expérience personnelle du Christ, Augustin insiste : "Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors et c'est là que je te cherchais…" (Confessions. X, xxvii, 38).

Comme le Père du fils prodigue attend son enfant, le guettant avant même qu'il ne se manifeste à l'horizon, (cf. Lc 15, 11-31) - et il le guette certainement depuis avant même que le fils ait eu l'idée de rentrer - comme il l'accueille en l'embrassant, avant qu'il n'ait pu parler pour exprimer son désir de servir désormais son Père comme l'un de ses serviteurs, pour nous aussi, le pardon précède la faute et dès lors précède même notre repentir (car sans pardon, sans ce don parfait de Dieu, nous ne pourrions pas nous repentir vraiment). Jésus en Jn 13 a lavé les pieds de Pierre en premier… lui signifiant par là son pardon, avant même qu’il n'ait renié trois fois. Et après la Résurrection, Jésus interroge Pierre par trois fois : "Pierre, m'aimes-tu". La réponse de Pierre, manifestation du pardon reçu, est le moment choisi par Jésus-Christ pour lui confier sa véritable mission d'apôtre : la charge de faire paître le troupeau et de continuer l'oeuvre.

L’amour gratuit de Dieu n’attend pas nos mérites pour nous pardonner. Nous touchons là la perfection du don de Dieu pour chacun d'entre nous : le par-don (avec le suffixe initial "per" qui souligne l’intensité, la totalité), c'est le "don le plus intense", le don inconditionnel du Père qui ne cesse d'aimer les pécheurs que nous sommes...

Nous méditerons ces jours-ci ce petit passage de Jean-Marie Gueullette :

"...le piège est de différer [l’union à Dieu] à cause de ton péché, en continuant inlassablement à répéter que tu n’es pas digne de recevoir le Seigneur, quand celui-ci veut se donner à toi. Car il y a là un véritable piège tendu par le péché. Le péché tend en effet à t’identifier à lui – je ne suis que pécheur, je ne suis que mon péché -, ce qui te rend incapable d’accueillir le pardon, le salut qui t’est offert par Dieu. Dieu peut te sauver et te pardonner dans des situations effroyables, mais il ne peut rien si tu te rends sourd à force de honte et de culpabilité."
(Jean-Marie Gueullette, op. Laisse Dieu être Dieu en toi. Petit traité de la liberté intérieure, Cerf, 2012, p. 46).

Retour pour relire le court extrait d'Origène sur la résurrection de Lazare.

Autres textes pour le Carême

Basile de Césarée (pour le dimanche des Rameaux et de la Passion)

"Le plan conçu par Dieu pour sauver l'homme consiste à le ramener de son exil, à le faire revenir dans l'intimité de Dieu en le tirant de l'éloignement créé par sa désobéissance. Voilà ce qui motive le séjour du Christ dans la chair, les exemples de vie donnés dans l'Evangile, la passion, la croix, l'ensevelissement et la résurrection : que l'homme, sauvé par l'imitation du Christ, retrouve son ancienne situation de fils adoptif.

Il est donc nécessaire, pour une vie parfaite, d'imiter le Christ, non seulement en suivant les exemples de sérénité, d'humilité et de patience qu'il nous a donnés pendant sa vie, mais aussi dans sa mort même, comme dit saint Paul, l'imitateur du Christ : Reproduire en moi sa mort, dans l'espoir de parvenir, moi aussi à ressusciter d'entre les morts.

Comment donc lui ressembler dans la mort ? En nous ensevelissant avec lui par le baptême. Mais de quelle manière s'ensevelir ? Et quel avantage tirer de cette imitation ? D'abord il est nécessaire de rompre avec sa vie passée. Cela est impossible à moins de naître d'en haut, selon l'expression du Seigneur. Cette "régénération", comme le mot l'indique, est le commencement d'une seconde vie. Si bien que pour commencer celle-ci, il faut mettre fin à la précédente. Dans la double course du stade, un arrêt, un léger repos sépare l'aller du retour ; de même, lorsque l'on change de vie, il paraît nécessaire qu'une mort intervienne entre les deux vies pour mettre fin à la précédente et inaugurer ce qui suit.

Et comment donc réussir à descendre au séjour des morts ? En mimant l'ensevelissemnt du Christ par le baptême. En effet, le corps du baptisé est comme enseveli dans l'eau. Par conséquent, c'est l'abandon d'une vie selon la chair que le baptême suggère symboliquement. Comme dit l'Apôtre : Vous avez reçu une circoncision où la main des hommes n'est pour rien, et qui vous a dépouillés du corps charnel : c'est la circoncision venue du Christ ; vous avez été ensevelis avec lui par le baptême. Le baptême purifie l'âme, pour ainsi dire, de la souillure venue des pensées charnelles, comme il est écrit : Tu me laveras, et je serai plus blanc que neige. [...] C'est pourquoi nous ne connaissons qu'un seul baptême qui donne le salut, puisqu'il n'y a qu'une seule mort pour le rachat du monde et une seule résurrection des morts, toutes deux figurées par le baptême.

(Sermon de St Basile sur le Saint-Esprit, 15, 35)

"Ramener l'homme de son exil"... Et où donc est l'homme ?
L'homme souvent s'éloigne de son coeur où Dieu l'attend... Comme le dit Augustin au livre X des Confessions :

"Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors
et c'est là que je te cherchais,
et sur la grâce de ces choses que tu as faites,
pauvre disgracié, je me ruais !
Tu étais avec moi et je n'étais pas avec toi ;
elles me retenaient loin de toi, ces choses qui pourtant,
si elles n'existaient pas en toi, n'existeraient pas !"

Dispersés au loin, nous ne savons pas que Dieu est "plus intime à nous-même que nous-même", si intime que nous ne le voyons pas, et combien souvent nous ne voulons même pas nous attarder sur cette pensée qui nous gêne...

Alors au moment d'entrer dans cette Semaine Sainte, reviens vers toi... Cesse un instant de t'agiter, et de courir, et reste près de Dieu "qui est plus intime à toi-même que toi-même". Fais silence, ensevelis-toi avec le Christ pour ressusciter avec lui au matin de Pâques pour une vie nouvelle...

Retour pour relire le texte de Basile sur l'Esprit Saint.

Autres textes pour la Semaine Sainte.