"... la vocation vient bien nous déranger dans notre rangement, mais c'est parce qu'elle met tout ce bazar en place, qu'elle met à leur juste place tous les éléments de notre fouilli intérieur. Elle vient mettre de l'ordre, c'est-à-dire ordonner autour de notre vrai désir, de notre désir le plus profond. Notre vocation est en nous : c'est ce désir. Y répondre, ce n'est pas étouffer ce que nous avons dans le coeur pour suivre la volonté de Dieu. C'est au contraire faire toute la place à ce désir que Dieu a mis en nous quand il nous a créés et qui est, de façon parfois un peu mystérieuse, un désir de Dieu." (pp. 115-116).
puis :
"Que ta volonté soit faite, Seigneur. Ta volonté, c'est-à-dire la mienne, c'est-à-dire celle que tu as placée en moi, et qui ne me laissera jamais tranquille, tant qu'elle ne m'aura pas conduit jusqu'à toi." (p. 117)
Et Adrien Candiard nous explique plus loin :
Comme pour Nathanaël "notre engagement ne dit rien de nous, mais il dit tout de Dieu" (p. 128).
C'est tout le petit ouvrage d'A. Candiard - mais si grand par le contenu ! - qu'il convient de lire pour saisir ce qu'il veut signifier ici. Il est clair qu'il n'y a pas opposition entre "ma" vocation, comme chacun tient à l'affirmer, et "la vocation de Dieu sur moi", son appel ! Dieu veut de moi... "moi" ! C'est cela seul qui lui importe ; mais un vrai "moi", c'est-à-dire un "moi" heureux, accompli, et toujours plein de désir, "moi" ayant trouvé ma voie, cet appel irrésistible qui est en moi, qui me tenaille mais que souvent je ne veux pas entendre, je ne sais pas entendre...
Sachons d'ailleurs que ce désir ne sera pas pour autant apaisé, ne sera jamais apaisé, car il est profondément élan vers Dieu. Dieu étant infini, mon vrai désir ne peut être qu'infini !
Quand on est en chemin aux côtés de quelqu'un qui cherche, bien sûr on ne peut chercher pour lui, ni lui proposer un chemin (qui serait automatiquement un "dévoiement", une sortie du chemin !). Son chemin n'est pas mon chemin. Ce que l'"accompagnant" peut seulement faire, c'est, en préparant le terrain, de favoriser l’éclosion de la parole, de la "bonne nouvelle", de l’évangile en chacun, c'est-à-dire précisément en ce lieu du désir le plus intime. Le "catéchiste" n'annonce pas grand'chose ! c'est le "catéchisé" qui découvre. Nous croyons, répétons-nous, que Dieu est en chaque homme (qu'il est venu "y faire sa demeure" Jn 14, 23) ; alors comment douter que c'est Lui qui se révèle en chacun ? il faut simplement partir du désir de l’homme, et non pas de son indifférence. C’est ce que nous apprend de façon magnifique St Augustin qui montre comment Dieu est venu le trouver au sein même de son péché, dans la ligne même de St Paul qui dit en 2 Co 5, 20 : « [Dieu] l’a fait péché pour nous ».
Le Christ est toujours notre modèle pour l’annonce de la bonne nouvelle, pour l’"évangélisation" ! Jésus vient trouver la Samaritaine dans son désir d’eau vive, ou d’époux, ce qui est la même chose ! De même il trouve Zachée perché sur son sycomore : Zachée qui désire voir, parce qu’il a besoin d’être regardé en vérité, et Jésus s’invite chez lui... Sa conversion est immédiate parce que Jésus a trouvé le lieu de son désir !
Même si c'est nous-mêmes en premir lieu qui sommes concernés, il peut nous revenir à tel ou tel moment de la vie d'avoir à aider quelqu'un de notre entourage qui veut trouver son chemin : contentons-nous de labourer, de préparer la terre, et c'est alors lui qui trouvera le chemin de son désir... celui où se tient le Christ.