L'Autre dans ma vie, n'est pas le produit de mon imagination : celle-ci, contrairement à ce qu'on pense parfois, n'invente que du connu ! Or l'Autre véritable est toujours surprenant. En étant "surprise de Dieu", l'Autre est encore lumière. Il n'y a jamais illumination dans le "trop connu". Pour connaître la joie, il faut se dégager des "pensées enténébrées" dont parle St Paul (Eph. 4, 18), pensées qui nous sont propres, alors que de l'Autre viennent les "pensées surprenantes" et la joie ; c'est dire le lien entre la surprise et la joie.
Il est vrai que Dieu est toujours surprenant. Elie le cherche dans un vent violent, il le trouve dans une brise légère. Combien de fois Jésus n'est pas compris, par les Juifs de son entourage et même par ces Juifs choisis et préparés que sont ses apôtres. Tous l'interrogent : "pourquoi", "comment ?" ou lui demandent par exemple en Mt, 15,15 : "Explique-nous la parabole."
Il faut dire qu'il y a pour les apôtres de quoi être surpris par celui qui les a choisis - et c'est déjà là paradoxe : le Christ les choisit pour les rendre libres. Mystère de cette liberté donnée par celui-là seul qui en est le maître.
Pour continuer à dresser la liste des "surprises" apportées par le Christ, que voyons-nous ? Jésus mange avec les pécheurs, annonce que les premiers seront derniers et que les derniers seront premiers ; il invite Nicodème à renaître et celui-ci ne comprend pas comment un homme adulte pourrait rentrer dans le ventre de sa mère ; il déclare en Mt 10, 35-36 qu'il est "venu opposer l'homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa famille." ; il donne aux ouvriers de la dernière heure autant qu'à ceux qui ont peiné tout le jour… Jean-Baptiste lui-même le fait interroger : "Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ?" (Mt 11, 3), tant son étonnement est grand de voir, de sa prison, que Jésus ne fait pas ce que lui, Jean, le prophète de Dieu, attendait.
La surprise de Dieu, c'est encore ce Dieu qui a soif ("donne-moi
à boire", dit-il à la Samaritaine, "j'ai soif"
crie-t-il sur la Croix, Jn 19, 28), ce Dieu qui frémit en son cœur et qui pleure devant la mort
de son ami Lazare, ce Dieu qui ne se résout pas à abandonner l'homme alors que celui-ci
l'abandonne constamment. On connaît le célèbre passage des Confessions d'Augustin :
Bien tard, je t'ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle, bien tard, je t'ai aimée !
Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors,
et c'est là que je te cherchais, et sur la grâce de ces choses que tu as faites, pauvre disgracié, je me ruais !
Tu étais avec moi et je n'étais pas avec toi ;
elles me retenaient loin de toi, ces choses qui pourtant,
si elles n'existaient pas en toi, n'existeraient pas ! (X, xxvii, 38)
L'homme ne comprend pas Dieu, effectivement, et souvent il fuit ce Dieu qui pourtant est au-dedans de lui, effrayé par toute cette surprise qu'il lui faudra bien affronter un jour pour devenir totalement homme.
L'Evangile ne manque pas de déclarations fracassantes et incompréhensibles, y compris pour
les apôtres : "Qui aura trouvé sa vie la perdra et qui aura perdu
sa vie à cause de moi la trouvera." (Mt 10, 39). Et que dire ce cette plus grande
surprise encore que nous a préparée Dieu et qui est la Résurrection : n'insiste-t-on pas alors
sur la joie des apôtres ? C'est Jean (Jn 20, 20), le dimanche soir, quand Jésus leur montre
ses mains et son côté : "Les disciples furent remplis de joie à la
vue du Seigneur" ; ou Luc qui nous dit cette joie étonnée des apôtres retrouvant
Jésus ressuscité : "Et comme, dans leur joie, ils ne croyaient pas
encore et demeuraient saisis d'étonnement, il leur dit : "Avez-vous ici quelque
chose à manger ?"" (Lc 24, 41).
Jésus une fois encore leur dit la chose la plus simple qui soit : "Avez-vous
quelque chose à manger ?" : pas de grandes déclarations, mais tout cet humour et cet
amour de Dieu : Jésus rit et est dans la joie de voir la surprise émerveillée des apôtres.
On n'a jamais fini de chanter les merveilles(12) de Dieu :
-"Toi, le Dieu qui fait merveille, tu fis savoir
parmi les peuples ta force" (Ps 77 (76), 14 (77, 15))
-"je te rends grâce pour tant de prodiges : merveille
que je suis, merveille que tes oeuvres. Mon âme, tu la connaissais
bien" (Ps 139 (138), 14)
Que sont pitoyables en revanche ceux qui veulent surprendre Jésus, comme ces pharisiens de Mt 22, 15 sq qui l'interrogent sur l'impôt à César ! Dieu nous connaît par cœur, et surprend toujours ses interlocuteurs : "Il m'a dit tout ce que j'ai fait !" s'écrie la Samaritaine (Jn 4, 29).
Nous cherchons Dieu dans de très grandes choses, dans de grandes actions et des faits d'éclats. Comme les apôtres et les contemporains de Jésus, nous cherchons des "signes", mais il ne nous est donné que le "signe de Jonas", le prophète qui demeure trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson, Jonas qui annonce que Ninive sera détruite, portant ainsi les hommes au repentir : Dieu ne détruit pas Ninive.
Toujours surprenant, Dieu est là où on ne l'attend pas. Il nous offre ce que nous n'espérons pas, Il nous donne (Se donne) toujours, même quand nous croyons ne plus rien vouloir et désirer…
Il arrive par surprise, ce Dieu que nous ne savons pas voir, pour se révéler en de toutes petites choses, souvent par l'entremise de toutes petites personnes (les pauvres du Royaume) que nous n'aimons pas encore… Délicatesse de Dieu qui, pour nous donner sa grâce, nous fait aussi découvrir quelqu'un que nous ne connaissions pas, et nous donne une "double" grâce(13) ; Dieu qui nous donne un proche de plus et une grâce infinie.
Ce n'est donc pas sans raison que nous sommes invités à devenir des "hommes nouveaux", des hommes "renouvelés" par la surprise, par ce qu'ils n'attendent pas, par ce qu'ils ne peuvent même pas imaginer, car Dieu est au-delà de toute imagination, et à l'image de l'Amour de Dieu l'Amour de l'Autre n'est que découverte, surprise perpétuelle… Si cesse cette découverte vient la lassitude qui tue l'amour(14). Mais la vie véritable n'est-elle pas renouvellement sans fin, jaillissement ? La mort est toujours la même : ne dit-on pas "triste à en mourir", "mourir d'ennui"…
Seul l'Amour peut vaincre la mort, et "l'éternité n'est pas de trop"(15) car c'est Dieu "qui sauve mon âme de la mort pour que je marche dans la lumière des vivants" (Ps 56 (55), 13).
L'Amour, alors, n'en finit pas ; il est véritablement infini s'il demeure marqué par cette surprise inépuisable que nous donne l'Autre. Si nous ne pouvons pas nous surprendre nous-même parce que nous nous côtoyons depuis notre naissance et que nous nous connaissons par cœur(16), l'Autre est en nous ce renouvellement de la vie. L'homme nouveau ne peut naître que de la rencontre avec l'Autre, cette rencontre que fait Nicodème dans la nuit, cette rencontre que nous faisons parfois dans l'Amour et qui donne sens à la vie de l'homme, que cet Autre soit l'Aimé qui nous accompagne ici-bas, ou soit Dieu lui-même, le Tout-Autre.
Si l'on est tenté de dire que c'est avec Dieu, ce Dieu surprenant, que l'on peut vraiment apprendre à aimer l'Autre, ne pourrait-on pas ajouter que c'est aussi avec l'Autre, le proche, que nous voyons toujours avec un étonnement renouvelé et joyeux, que l'on apprend à aimer vraiment Dieu ? C'est toujours dans l'Amour et par l'Amour que l'on entre en cette unité, mystère profond de l'Amour de Dieu.
La joie se manifeste enfin pour l'homme après un long parcours. Alors que le péché est division(17), entraînant avec lui tout un cortège de souffrances, la joie parfaite vient de l'unité, unité qui ne se trouve qu'en Dieu.
Dieu unique et trois, pour que chaque personne tire sa joie des autres, et qu'elles soient en même temps totalement un, perfection de la joie. Mystère insondable de la Trinité. Comment atteindre, autrement que par le Chemin, ce cœur de Dieu où l'homme est appelé à entrer, pour être dans cette unité de Dieu qui veut l'homme avec lui ? Déjà dans ce monde, l'homme peut entrevoir cette unité de Dieu par sa relation avec l'Autre ("Soyez un comme mon Père et moi nous sommes un") : commencement pour nous de cette joie trinitaire qui se vit bien avant de se raconter.
Mais n'est-ce pas là, dans cette attente de l'éternité de l'homme, que réside tout le mystère de la souffrance de Dieu (qui nous apprend qu'il peut y avoir joie et souffrance) ? Dieu qui a fait l'homme par Amour, qui l'aime d'un Amour infini peut-il vivre sans souffrance cette séparation que Lui impose l'homme qui a choisi de se détourner, de s'écarter, de quitter l'unité ?
Dieu a voulu faire connaître à l'homme Son désir et l'invite à avoir le désir de Lui. Tout le livre d'Osée exprime la violence jalouse du désir de Dieu pour son épouse infidèle… "C'est pourquoi je vais la séduire, je la conduirai au désert et je parlerai à son cœur." (Os 2, 14).
Chemin du désert, chemin de la nuit avant le jour, chemin de l'attente avant l'union.
Mais le chemin est venu à nous, pour nous mener à la demeure. "Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14, 6). La vie est unité en chemin, unité qui avance à cause du désir (désir de l'Autre), unité donnée par Dieu à l'homme nouveau.
C'est l'invitation de Paul aux Ephésiens :
"…en toute humilité, douceur et patience, supportez-vous les uns les autres avec charité ; appliquez-vous à conserver l'unité de l'Esprit par ce lien qu'est la paix. Il n'y a qu'un Corps et qu'un Esprit, comme il n'y a qu'une espérance au terme de l'appel que vous avez reçu ; un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême ; un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tous et en tous." (Eph 4, 2-6).
Et les propos de St Clément de Rome aux Corinthiens :
"Pourquoi parmi vous, des disputes, des colères, des divisions, des scissions et la guerre ? N'avons-nous pas un seul Dieu, un seul Christ, un seul Esprit de grâce répandu sur nous, et une seule vocation dans le Christ ? Pourquoi écarteler et déchirer les membres du Christ, pourquoi nous révolter contre notre propre corps, et en arriver à une telle démence oublier que nous sommes membres les uns des autres ?" (Lettre aux Corinthiens, 46, 2).
La métaphore du corps est bien connue (cf. St Paul) ; qu'elle ne fasse pas oublier la réalité, sans laquelle la métaphore elle-même n'a pas de sens. Il faut redire que si Dieu a choisi de prendre un corps d'homme par l'Incarnation, c'est parce que ce corps, fait par le souffle de Dieu, est à son image (Gn 1, 27 ; 9, 6), c'est-à-dire encore est pour sa gloire ("Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, et quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu.", 1 Co 10, 31). Au-delà de la métaphore et de ce qu'elle permet de comprendre en ce qui concerne les rapports du Christ (tête) et de l'Eglise (corps), rappelons combien le corps est d'importance dans la Bible, même si une tradition (tardive) de l'Eglise a entraîné beaucoup de chrétiens au mépris du corps plus qu'à la louange. Ce corps, demeure de l'Esprit, loin des divisions, des rejets, des refus, des séparations, est fait pour "l'unité de l'Esprit". Le corps de l'homme, créé par Dieu et qui a mérité que Dieu s'incarne, est le véritable lieu de manifestation de la joie, le lieu de la jubilation, qui n'est jamais un exercice cérébral. N'oublions pas comment Augustin dépeint son Amour pour Dieu :
Eh bien ! qu'est-ce que j'aime quand je t'aime ?
Ce n'est pas la beauté d'un corps, ni le charme d'un temps,
ni l'éclat de la lumière, amical à mes yeux d'ici-bas,
ni les douces mélodies des cantilènes de tout mode,
ni la suave odeur des fleurs, des parfums, des aromates,
ni la manne ou le miel,
ni les membres accueillants aux étreintes de la chair :
ce n'est pas cela que j'aime quand j'aime mon Dieu.
Et pourtant, j'aime certaine lumière et certaine voix,
certain parfum et certain aliment et certaine étreinte
quand j'aime mon Dieu :
lumière, voix, parfum, aliment, étreinte
de l'homme intérieur qui est en moi,
où brille pour mon âme ce que l'espace ne saisit pas,
où résonne ce que le temps rapace ne prend pas,
où s'exhale un parfum que le vent ne disperse pas,
où se savoure un mets que la voracité ne réduit pas,
où se noue une étreinte que la satiété ne desserre pas.
C'est cela que j'aime quand j'aime mon Dieu.
(Confessions, X, vi, 8)
Mais c'est Dieu le premier qui a parlé, et qui a donné le "ton".
L'Amour du Dieu unique se déclare :
"Unique est ma colombe, ma parfaite. Elle est
l'unique de sa mère, la préférée de celle qui l'enfanta."(Ct 6, 9).
Dans la Bible sont uniques le fils, la fille, l'enfant, la colombe, la mer, le pasteur,
le chef et le jour, qui est jour de lumière :
"Et il y aura un jour unique - le Seigneur le
connaît - plus de jour ni de nuit, mais au temps du soir, il y aura de la lumière."
(Zach. 14,7).
Sont encore uniques le pain, l'époux, le souverain, le sacrifice, le Père, le Fils et
l'Esprit :
"Écoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est l'unique
Seigneur" (Dt 6, 4).
Et de l'unique on passe à l'un. Mystérieuse parole : "Je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée, pour qu'ils soient un comme nous sommes un" (Jn 17, 22). Définition de l'Amour ? Un toujours ; présents comme absents ; dans la parole et dans le silence…
"Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés" (Jn 13, 34, Jn 15, 12) : Commandement nouveau pour homme nouveau. Le commandement est nouveau et ainsi il nous appelle à être des hommes nouveaux et à être des chantres du monde nouveau dans un cantique nouveau(18) : " Chantez-lui un cantique nouveau, de tout votre art accompagnez l'acclamation !" (Ps 33 (32), 3). C'est ce cantique nouveau que l'on retrouve dans la bouche des élus de l'Apocalypse : "Ils chantent un cantique nouveau devant le trône et devant les quatre Vivants et les Vieillards. Et nul ne pouvait apprendre le cantique, hormis les cent quarante-quatre milliers, les rachetés à la terre." (Ap 14, 3).
Il n'y a que joie et paix là où il y a unité et Amour : demeure lumineuse de ceux qui s'aiment, demeure où le Bien-Aimé retrouve la Bien-Aimée qui défaille tant est grand l'Amour de son Seigneur : "Soutenez-moi avec des gâteaux de raisin, ranimez-moi avec des pommes, car je suis malade d'amour" (Ct 2, 5), où vivent bienheureux ceux qui, le visage découvert, contemplent, comme en un miroir la gloire du Seigneur et sont "transformés en cette même image, allant de gloire en gloire, comme de par le Seigneur, qui est Esprit" (2 Co 3, 18).
L'Amour, demeure de lumière,
Unité dans l'Amour avec l'Unique Autre.
Joie, joie, joie…
* On aura compris que dans ce texte, il ne s'agissait pas de discuter de traduction ou des choix des traducteurs, ni d'opposer et comparer les diverses traductions de la Bible dans une perspective linguistique et exégétique. Il s'agit ici de méditer sur la joie à partir d'un texte pris comme un donné (en l'occurrence ici la Bible de Jérusalem et parfois des traductions liturgiques). Le texte de la BJ, tel qu'il est donné, Parole de Dieu, donné en français à des Français selon la tradition de l'Eglise, comporte tout ce qu'il faut pour nourrir la méditation de tous, et bien sûr de ceux qui ne sont pas spécialistes de traduction, comme toute version le permet, sauf si elle est volontairement appauvrie et aplatissante. Certes, la question de la traduction de la Bible est complexe et on peut toujours se demander si la cette Parole de Dieu en 2002, répandue aux extrémités de la terre, dit exactement la même chose que lorsque Dieu s'adressait au Peuple dans le désert, ou même quand Jésus s'adressait à la petite communauté de ses disciples, etc. De fait, elle ne dit pas la même chose, elle dit plus car elle est nourrie précisément par toutes les traductions, par toutes les traditions interprétatives, par les figures et par les rapprochements qui sont effectués progressivement, au cours des siècles de l'histoire de l'Eglise. L'homme s'avance ainsi vers Dieu ou plus exactement Dieu s'avance vers l'homme, vers son Eglise (la parousie) ; cet immense mouvement se construit à travers les traductions dans les langues de plus en plus nombreuses et diverses, les traditions multiples, jusqu'au jour où nous tous, les hommes assemblés dans son Amour, Le connaîtrons et Lui serons semblables car nous Le verrons tel qu'Il est (1 Jn 3, 2).
(12)
: "Merveilles", de miribilia = choses étonnantes, admirables.
(13)
: Mais "double" n'existe pas dans le langage de Dieu c'est "centuple" qu'il faudrait dire,
avec les fruits dans le Royaume, ou "soixante-dix-sept fois" comme dans l'Evangile (Mt 18, 22),
le nombre de fois où il faut pardonner, le nombre de fois où il faut aimer.
(14)
: Nous avons assez dit que l'Autre est toujours surprenant, comme par définition ;
quand notre relation d'Amour échoue, c'est parce que l'autre n'est pas assez "autre" pour nous,
que nous refusons la surprise, qu'il n'éveille plus d'étonnement en nous. Comment pourrions-nous
aimer qui nous ressemble trop, qui est comme nous ? Cette illusion d'amour ne dure que quelques
jours et la lassitude survient… Dans l'Amour véritable, se vit la découverte quotidienne de
l'Autre, et de soi à travers l'Autre qui nous révèle à nous-même, il n'y a jamais lassitude,
et toujours désir de celui qui nous surprend toujours.
(15)
: Pour reprendre là le titre de l'admirable roman de François Cheng (Albin Michel, 2002).
(16)
: Quand nous avons le sentiment de "mal nous connaître", c'est surtout notre lassitude
de nous que nous avouons, et nous n'en sommes que plus malheureux éprouvant ce sentiment de
courir après soi, d'être écartelé entre des tendances non maîtrisées : il s'agit là sans doute
d'un des aspects les plus douloureux de la condition humaine : l'homme qui naît et vit dispersé,
et passe sa vie à chercher l'unité.
(17)
: La division est la première expérience dans notre vie : division de l'homme en lui-même
(on parle souvent d'écartèlement), division des uns par rapport aux autres (cf. par exemple les
divisions même de l'Eglise et toutes les guerres), séparation de l'homme d'avec Dieu…
(18)
: Augustin ne dit-il pas la puissance de l'Amour et de ce commandement nouveau lorsqu'il
rappelle qu'il est nouveau parce qu'il est dit "aimez-vous les uns
les autres comme je vous ai aimés" (Jn 13, 34) : "C'est cet
amour-là qui nous renouvelle, pour que nous soyons des hommes nouveaux, les héritiers du
testament nouveau, les chantres du cantique nouveau." (Homélies sur l'Evangile de
Jean, Tr. 65, 1).