Adrienne von Speyr (1902-1967)

Un extrait de St Marc commenté par Adrienne von Speyr.

Adrienne von Speyr avait coutume de proposer des "points de méditation" à ceux qui autour d'elle se livraient à la lecture quotidienne de l'Ecriture... Ici un texte pour une méditation sur la multiplicaation des pains [à partir de Mc 6, 31-44]. Pensons-nous toujours à comprendre l'Eglise comme le lieu continuel de la multiplication des pains ? A rapprocher ce texte du moment crucial de la communion au cours de l'Eucharistie, où le Christ se donne à tous, à profusion et sans tracer de frontières ?... Il ne sélectionne personne, il bénit [dit du bien de] tous ceux qui sont venus l'entendre... Il donne à profusion et les morceaux qui restent remplissent encore douze couffins...
Cette grande mystique nous introduit à la lecture de Marcdans toute sa profondeur...

"Il rompit le pain, et il les donnait à ses disciples pour les leur servir [aux personnes venues écouter Jésus]. Il partagea aussi les deux poissons entre tous. Il donne les pains et les poissons à partager : on ne voit d'abord rien d'une multiplication. Mais il a été question de bénédiction : le miracle procèdera de cette bénédiction. Le Seigneur a lui même béni les pains en vue de tous ces gens affamés qui sont à présent à son service et lui appartiennent, non parce qu'ils se seraient déclarés pour lui, ni en raison d'une aspiration chrétienne longuement éprouvée, mais parce qu'il les considère comme les siens. Ils reçoivent sa parole, c'est pourquoi ils lui appartiennent. Aux siens il offre tout, les pains, les poissons, la bénédiction, l'apaisement de la faim, lui-même. Et tout procède de la bénédiction. La bénédiction telle qu'il la donne montre qu'il reconnaît les auditeurs comme les siens, qu'il se sent obligé à leur égard, qu'il contracte avec eux un lien qui n'aura pas de fin, un lien qui plus que jamais s'accomplira dans le pain et le vin de l'eucharistie. C'est étonnant que Marc ne rapporte rien sur la multiplication elle-même, comme s'il craignait de montrer tout le contour de la grâce. Il raconte seulement combien il y avait de pains au départ et combien de gens ont été rassasiés. Le miracle lui-même reste dans l'entre-deux, non mentionné, comme la grâce à jamais incommensurable. Et le Seigneur n'opère pas ce miracle seul. il pourrait tout aussi bien partager lui-même la nourriture. C'est bien lui qui l'a bénie. Mais il se sert des autres qui font le partage. Les disciples commencent à agir en prêtres, comme ceux qui ont à administrer le pain du Seigneur, à le partager à tous ceux que le Seigneur reconnaît comme les siens..."

(Speyr, Adrienne von : Saint Marc. Points de méditation pour une communauté, Socéval Editions, 2006, pp. 310-311).