Marion Muller-Colard

Eclats d'Evangile

"... Pour Jésus, ce que les hommes appellent vivre peut parfois signifier perdre sa vie. Pareillement, ce que les hommes appellent mourir peut parfois signifier retrouver sa vie.
Dans l'absolu, avoir la foi - suivre le Christ - nous appelle à abandonner nos résistances pour entendre là une bonne nouvelle. Et cette bonne nouvelle se dispense de tout dolorisme et de toute martyrologie : elle nous invite à la vie éternelle, une vie qui ne se confond plus avec les circonstances de notre quotidien mais qui ouvre devant nous les portes que nous peinons à ouvrir de notre petit vivant : celles de l'Eternité et de l'Infini, les portes du Grand Vivant.
A bien y réfléchir, n'est-ce pas nous qui sommes d'incorigibles rabat-joie ? Car notre joi est conditionnée par nos propres exigences, nos exigences sont conditionnées par nos perceptions immédiates, nos perceptions immédiates sont conditionnées par des effets de mode tellement infiltrés que nous les confondons avec les essences d'éternité que diffuse l'Evangile. Il ne s'agit d'ailleurs plus vraiment de discernement mais d'un abandon doux à la confiance : une invitation au repos, en quelque sorte. Ne nous donnons donc pas tant de peine, ce que nous avons à perdre n'est rien en mesure de ce que nous avons à gagner : une joie inconditionnelle, qui se moque du diagnostic des hommes quant à ce qui paraît vivant et ce qui paraît mort. Une joie parfaite."

Et la prière qui suit, adressée par l'auteur au Christ, s'achève :

"Et à l'heure de notre mort,
qu'il nous soit donné de mourir en toi vivants."

Eclats d'Evangile, Commentaire sur Marc 8, 27-35, Bayard, 2017, pp. 19-20.

Ecrivain contemporain, profondément inspirée par la lecture et la méditation constante de l'Evangile, Marion Muller-Colard, dans cet ouvrage paru chez Bayard, nous offre nombre de ses commentaires bibliques publiés dans la revue "Réforme" à la lumière de l'Evangile. Elle invite le lecteur à saisir le sens de mots et d'expressions qui peuvent sérieusement bousculer sa vie, dès lors qu'il connaît une certaine "intranquillité" (titre d'un autre de ses ouvrages) avec Jésus. Occasion profonde pour nous de découvrir ce qu'il advient souvent de celui qui suit le Christ, toujours emporté au souffle inédit de l'Esprit... Un très beau chemin marqué par l'eau vive, la lumière, le souffle qui renouvellent et qui entraînent dans un ailleurs toujours à découvrir...